Guillaume St-Pierre
Le Droit
L’historien Serge Miville croit que la fête de la Saint-Jean est l’occasion de voir tous les francophones du pays s’unir et festoyer.
Il est grand temps d’enterrer la hache de guerre. Les Québécois n’ont rien volé aux Franco-Ontariens lorsque René Lévesque a décrété en 1977 que la Saint-Jean-Baptiste serait la Fête nationale du Québec. Plus, cette fête, célébrée aux quatre coins du pays depuis le xixe siècle, devrait être l’occasion de rappeler ce qui unit les francophones, pas ce qui les divise. C’est en tout cas l’avis de Serge Miville, historien et candidat au doctorat à l’Université York.
« Certaines personnes en Ontario français se sont senties blessées en 1977, lorsque le Québec a institutionnalisé la Saint-Jean, affirme M. Miville. Ils ont vu cela comme une injustice. Un mur quasi insurmontable entre eux et le Québec. »
Cette « grogne » à l’endroit du Québec perdurerait aujourd’hui dans certains cercles franco-ontariens d’Ottawa, au grand désarroi du jeune historien de 24 ans.
« La Saint-Jean a toujours été une fête célébrée au Canada français en tant que fête nationale, explique-t-il. Il faut surmonter cette idée que le Québec a enlevé quelque chose aux Ontariens. On doit cesser de se sentir blessé et de penser qu’ils (les Québécois) sont des méchants. »
M. Miville, coupures de journaux en main, va même plus loin. « La montée du nationalisme québécois à cette époque et jusqu’au premier référendum n’a certainement pas nui aux revendications des Franco-Ontariens », avance-t-il. Le jeune historien qui n’a pas la langue dans sa poche donne pour preuve la décision du gouvernement de l’Ontario de financer une école francophone à Penetanguishene, à quelques semaines du référendum sur l’avenir du Québec en 1980.
Dans une entrevue diffusée à l’émission Tout le monde en parlait de Radio-Canada, le premier ministre ontarien de l’époque, Bill Davis, admet « qu’il est raisonnable de dire que ce n’est pas une pure coïncidence. Consciemment ou inconsciemment, la décision d’aller de l’avant avec l’école de Penetanguishene a été prise en partie pour démontrer au Québécois que nous comprenions la question linguistique. »
« Plus le Québec est fort, plus la francophonie canadienne est en santé », renchérit M. Miville.
Une vitrine culturelle
La Saint-Jean, tremplin pour un renouveau entre le Québec, le Canada et les francophonies minoritaires ? Serge Miville croit que oui. Et cela passera inévitablement par la culture, estime-t-il.
« La Saint-Jean est une occasion de parler de nos similitudes au lieu des différences. De célébrer ce qu’on a en commun. »
Que ce soit le rockeur québécois Éric Lapointe qui brûle les planches à Sudbury ou Damien Robitaille qui entonne ses mélodies sur les plaines d’Abraham à Québec un 24 juin, les échanges culturels entre communautés francophones ont été au coeur des célébrations de la Saint-Jean par le passé, et seront garants de l’avenir, conclut M.Miville.